Les programmes des concerts 2020 approchent le thème des « formes » en musique.

Avec leprogramme « Concerto, sonata, sinfonia », Hypothesis convie le public à un nouveau voyage hypothétique à travers l’Europe musicale de la fin du 17^ème et du début du 18^ème siècles. Ce parcours permet d’approcher trois formes que la culture musicale de l’époque affectionnait particulièrement : le Concert, la Sonate et la Symphonie. Du stile italiano in contrappunto des Sonates de G. Legrenzi au style français du Concert de L.A. Dornel, jusqu’aux Sonates en Trio de A. Vivaldi, de G.F. Haendel et de J.S. Bach, l’écriture évolue entre des nouvelles expérimentations et l’héritage ancien. Dans les Sinfonie – Inventions à trois voix – le contrepoint parvient à cet admirable entrelacement des thèmes qui fascinera le jeune Mozart. Pour que le jeu contrapontique devienne encor plus évident à l’écoute, il transcrira ainsi pour trois instruments plusieurs œuvres originairement écrites pour le clavier.

Concerto, Sonata, Sinfonia

Programme

Louis Antoine Dornel (1685 – 1765) “Premier concert en trio”: ouverture – air grave – loure, air rustique – chaconne

Giovanni Legrenzi (1626 – 1690) [Sonate a tre op. 4 & op. 8]: “La Tassa” (adagio – presto – allegro – solo – adagio – presto); “La Secca Soarda” (adagio – allegro – adagio – allegro); “La Bonacossa” (allegro – adagio – allegro – presto – adagio – allegro)

Georg Friedrich Haendel (1685 – 1759) “Sonata sesta a tre” op. 5: grave – allegro – adagio – menuet & variatio

Antonio Vivaldi (1678 -1741) “Trio” : allegro ma cantabile – largo – allegro non molto

Johann Sebastian Bach (1685 – 1750): 8 “Sinfonie” (“Inventioni a tre parti”): sinfonia 5 (BWV 791) – sinfonia 4 (BWV 790) – sinfonia 14 (BWV 800) – sinfonia 9 (BWV 795) – sinfonia 10 (BWV 796) – sinfonia 3 (BWV 789) – sinfonia 12 (BWV 798) – sinfonia 1 (BWV 787)

Johann Sebastian Bach “Sonata a tre” (BWV 1038): largo – vivace – adagio – presto (fuga)

Hypothesis a tre strumenti

Cinzia Zotti est diplômée en viole de gambe de la Scuola di Fiesole (Florence) et du Royal College of Music (Londres), titulaire d’une maîtrise de lettres et philosophie, d’un doctorat en histoire de l’art (Université de Gênes) et d’un doctorat en musicologie (Université de Toulouse). Comme interprète, elle s’intéresse à l’esthétique propre au répertoire ancien. Elle est autrice de la biographie du compositeur italien Adriano Banchieri : Le sourire du moine. Adriano Banchieri équilibriste sur le fil des querelle du ‘600 (éd. Serre, Nice, 2007).

Stefano Sopranzi est né à Rovigo, dans le Nord-Est de l’Italie. Diplômé en basson avec mention d’excellence au Conservatoire de sa ville natale, il s’est spécialisé en basson baroque au Conservatoire Supérieur de Genève où il a obtenu le master d’interprétation et de pratique de l’instrument historique. Il a poursuivi ensuite sa formation dans l’atelier de construction et recherche sur les bois à vent anciens de Pietro Sopranzi. Comme interprète, il a collaboré avec diverses formations de chambre et différentes orchestres (La Stravaganza, Il Giardino Armonico, L’Accademia Bizantina…).

L’espace, le son et la musique: l’esthétique musicale et les lieux de la musique, une histoire ancienne.

Et dans cette histoire la figure de Thomas Britton joue un rôle significatif…

Commerçant de charbon, Monsieur Britton était homme de culture aux intérêts divers, passionné de chimie, curieux d’astrologie … mais surtout très bon musicien. Son intérêt pour l’évolution de la théorie musicale et son excellente pratique du chant, de la flûte à bec et de la viole de gambe en particulier, étaient à l’origine de sa participation active aux concerts publics où des amateurs éclairés, comme Sir Roger L’Estrange, virtuose de la viole de gambe, côtoyaient les musiciens les plus appréciés du monde musical de l’époque : Pepusch, Dubourg, Haendel…
Grand collectionneur et connaisseur, Thomas Britton possédait un extraordinaire recueil d’instruments de musique et de partitions anciennes. Les concerts publics ne manquaient pas de puiser leurs programmes dans cette collection imposante où à côté de compositions d’auteurs anglais du 17^e et du 18^e siècles se trouvait un grand nombre de partitions de compositeurs italiens, de Frescobaldi à D. Gabrielli, de Albinoni à Vivaldi.
Le répertoire des mardis musicaux organisés chez le Charbonnier comprenait également plusieurs transcriptions d’opéras ainsi que des pièces spécialement écrites pour ces occasions.
Le goût pour la musique de chambre invitait aussi bien à la transcription qu’à la composition et encourageait la lecture d’œuvres anciennes dédiées aux consorts, aux ensembles restreints, exaltant l’intimité de l’art musical.
C’est là peut être l’une des raisons de la continuation d’une tradition esthétique qui va persister longtemps dans l’île britannique, où devait se développer plus tard le curieux phénomène de la survivance des instruments considérés désormais anciens et délaissés par le Continent.
Au moment où la scène théâtrale commençait à imposer une technique vocale visant à développer la puissance de la voix (la voix humaine comme la voix des instruments), l’espace réservé à la musique de chambre contribuait à préserver les paramètres esthétiques chers à l’écriture ancienne.
Dans ces lieux intimes, les auditeurs prisaient l’attention au détail, le contraste entre notes paisibles et notes dures, la capacité de la voix -déjà vantée par Piero Cerone un siècle auparavant – de « moduler de manière à rester en équilibre avec les instruments qui l’accompagnent ». L’ « harmonie fine de résonance » et la « délicatesse de ”touché” » qui seront invoqués plus tard par Hubert le Blanc « en défense de la viole de gambe contre les prétentions du violoncelle » deviennent alors des critères esthétiques dont il n’y a pas raison de se priver.
Dans ce contexte, ce n’est pas surprenant que l’éditeur John Walsh ait eu l’idée de publier des airs du Rinaldo de G.F. Haendel « adaptés curieusement » pour en permettre une interprétation « de chambre ».
Hypothesis voce sola & strumenti a voulu retrouver cet ancien goût pour l’ancien en imaginant un programme qui aurait pu être offert au public d’un hypothétique concert du mardi chez Thomas Britton.
L‘ensemble Hypothesis, dans sa formation à quatre, a enregistré le CD: G.F.Haendel Rinaldo en version de chambre que vous trouvez présenté sur ce site à la rubrique enregistrements.